Ici la main du peintre reçoit dans un don, toute la force de sa psyché, ces voix parlent tout haut dans l’inquiétude du réel, cette ostensible aptitude à tracer, aux sinusoïdales de la plume et de l’encre, au chatoiement du trait ou à sa sécheresse, au regard que la couleur renvoie dans la lumière, enfin au charme enamouré que l’œuvre rend inconsciemment et par retour aux fondements de l’être. Katherine Rey est en chemin.
Car tout peintre, tout « artiste » est celui qui trace, hors des chemins battus et, déjà, pour lui même, la sente qui file sous le pas, la main, le regard clos au dehors et ouvert au dedans, par devant soi, comme une parabole. C’est un acte de l’ urgence de soi, égoiste au bon sens. On entre en résistance propitiatoire, intensément oublié parce qu’au présent de soi. J’ai la forte impression qu un Janus biffron s’anime et qu’il donne dans l’instant, l’assurance du point émergent de soi, du Soi. Alors le coeur s’égaie, la main devient plus sure, le regard s’éclaire, un monde surgit de l’aptitude du génie et de sa présence oubliée… Mais pour cela, il faut que Katherine Rey se concentre, pousse la porte, qui, parfois reste close et parfois reçoit l’amène éclosion d’un printemps de l’âme, toujours sensible, toujours prête au meilleur comme au pire, c’est là toute une écoute….des possibles et de cette liberté de soi, qui, certain jour ne répond pas…
Ce travail est du, avant tout, à la concentration, à l’évocation, à l’épure, comme aux effets d’anamnèse et de tensions, de libérations et de nettetés. Katherine Rey ploie le temps, pépiements des oiseaux, couleurs au noir et bleu entêtement, occitan des soleils et des nuits, orient des jaunes orangés, terre de sienne brûlée, ocres jaunes…
Un ciel s’invente sur la terre, depuis ses profondeurs, depuis le noir du Chaos primordial, au don du ciel angevin. Traversées jubilatoires des pléiades et de Vénus, cette adorable beauté, joies des verseaux et des sources, ployant l’éternité au sein de la création dans le vaste vase où tout est inversé et où s’illumine le vaste monde inversé en soi… Miracle des reflets. dans un monde qui ne cesse de s’accroître.
funambule au somnanbulisme actif, tout se dit dans son trait, en toute justesse.
L’ exercice de funambule, dans une dimension importante, un dessin en grand dans sa portée, deux surfaces jouent dans une fausse continuité spatiale… deux « scènes » renvoient à cette question interrogative à droite et solitaire, a gauche collective à travers un carré, and so what…pourrait-on dire? mais nulle vacuité l’encre creuse en son noir l’abîme d’un plan virtuel, comme un souvenir survient…. fait indistinctement de pensées, de corps, de lignes, d’espaces intérieurs, de suspens, d’esquisse d’une danse tandis qu’à gauche cette silhouette fragile, féminine (?) comme un oiseau confronte le cadre avec énergie…. nous assistons au travail du peintre en direct, sans autre mesure que ce qui nous précède, survient et ce que notre propre rêverie établit de possibles dialogues, s’éprouve, s’ébroue aux lignes de cette interrogeante plastique du trait noir … encre magique…fait solaire sur la page blanche.
les masses se libèrent, s’allègent, voguent sans voile, légèretés internes, silences fluides, beautés transcrites de l’été au souffle chaud et ligérien..un espace en volume mu par un air invisible, croisements de couleurs, le trait noir est encore un lien de présences et d’inscriptions, tout ascensionnel au bonheur de l’été…..
la ligne se brise et s’enchante, poursuit sa route, surprend , revient , ascentionnelle et descendante, ligne du trait en continu qui surprend la forme comme s’il s’agissait de montagnes, de collines, de pierres et de ciel aux nuages essentiels, comme un tour de main qui surprend et caresse, s’abreuve puis repart, ligne de chance et de voyage, ligne de bonheurs intimes aux caresses blanches, à la pulsation douce….
Beaucoup de choses se parlent et tendent à s’accomplir dans l’oeuvre picturale et dessinée de katherine Rey.