Dans mes Érotiques, le sens de l’érotisme échappe à quiconque n’en voit pas le sens religieux. Réciproquement, le sens des religions échappe à quiconque néglige le lien qu’il présente avec l’érotisme. » Georges Bataille.
ÉROTIQUES, images détournées, collections, montages, autant d’opérations pour approcher L’Éros à travers ses représentations.
Dans Érotiques, une première série est née du désir de détourner certaines images dites érotiques au sens noble comme au vulgaire, mais avec une certaine distance, afin de former la « collection » LES LARMES D’ÉROS, dans une version contemporaine active, c’est à dire, tirée d’ un oeil contaminé par le pornographique.
Les références à la littérature, au cinéma surréaliste, aux écrits de Georges Bataille, à l’évocation du Mythe, forment le groupe des accumulations, des collections ÉROTIQUES où d’autres supports, images TV, Films, livres, un jeu de cartes original, interviennent également. Ils font l’objet de montages cherchant une double image apparaissant de loin, le X par exemple de Erotica Universalis, ou du moins d’un dynamisme de l’oeil, qui, permet à la fois au regard de ne pas se lasser et de voyager selon sa fantaisie dans la collection, comme également de penser qu’il pourrait s’en emparer pour en jouer, pour éventuellement composé sa propre version du montage, voire en jouir. LES ÉROTIQUES s’offrent au partage.
Ces collections en effet ne sont pas inactives sur le plan de l’excès, l’excitation, du débordement érotique. De fait la composition photographique devient un jeu de pousse-pousse magique propre à séduire et à agir, à travers cette finalité de la double image, parfois et de la pertinence de l’association des éléments réalisés dans cet ordre précis. Ludique et Érotique se partagent l’apanage d’inscrire l’excitation devant le déploiement des corps féminins en pleine représentation, petit cabinet de curiosités, très dix huitième siècle, dans une lecture tourbillonnante et « légère ». Le cru, parfois, offre des effets supérieurs dans le dévoilement de scènes fantasmatiques.
Ces collections évoquent le retour au licencieux, au non conforme. On s’y enflamme parait-il, les jeux de l’amour et du hasard, où tours et détours sont les complices affirmés d’une liberté d’espérer, provoquent l’ivresse, venues des respirations courtes et syncopées, de cris étouffés, de secrets partagés et d’intimités rêvées. Par provocation contre l’establishment, les contraintes sociales, les fausses maîtrises, se fait la nuit, jour inversé, des pulsions et des fantasmes, pour le meilleur et pour le pire…. Ici, toute licence est perturbation, provocation de l’ordre moral et appel à jouir. L’oeil devient humide.
Mention spéciale pour La Bête d’après le film de Borowcyk: quand la composition tourne à une certaine vitesse comme celle d’un LP sur une platine, apparait une mire hypnotique, d’où Art cinétique et di-simulation par le mouvement, intentions propres et mal-propres, c’est à dire avec à propos des scènes du film, liées au fantasme sexuel de la jeune promise anglaise. rêve pénétrant sur plus d’un plan, Borowcyk organise son film en entremêlant les scènes sexuelles liées à la légende qui habite le château et le déroulé d’un mariage improbable, placé sous l’ insigne possibilité de sortir de ce qu’une union antécédente a définitivement corrompu… Cette accumulation a la forme de l’escargot, elle approche la structure du fantasme et se mue en mire hypnotique, où les scènes disparaissent pour faire apparaitre l’envoutement final de la chute.
On peut citer les deux grands chefs-d’oeuvre que sont Histoire de l’oeil et Madame Edwarda. « La mer faisait déjà un bruit énorme, dominé par de longs roulements de tonnerre, et des éclairs permettaient de voir comme en plein jour les deux culs branlés des jeunes filles devenues muettes »
Emportement et précision de l’écriture, vision ironique globale, tout est là. « A d’autres, écrit encore Bataille, l’univers paraît honnête. Il semble honnête aux honnêtes gens parce qu’ils ont des yeux châtrés. C’est pourquoi ils craignent l’obscénité. Ils n’éprouvent aucune angoisse s’ils entendent le cri du coq ou s’il découvrent le ciel étoilé. En général, on goûte les « plaisirs de la chair » à la condition qu’ils soient fades. »
http://sortirducapitalisme.fr/notes-de-lecture/188-herbert-marcuse-eros-et-civilisation
« A la lumière de l’idée d’une sublimation non-répressive, la définition freudienne d’Eros […] assure une signification accrue. L’impulsion biologique devient une impulsion culturelle. Le principe de plaisir révèle sa propre dialectique. Le but érotique de conserver tout le corps comme sujet-objet de plaisir appelle le raffinement continuel de l’organisme, l’intensification de sa réceptivité, le développement de sa sensibilité. Le but produit ses propres projets de réalisation : l’abolition du travail, l’amélioration du milieu, la victoire sur la maladie et le vieillissement » (pp. 185). Pour Marcuse, « la sublimation non-répressive est totalement incompatible avec les institutions du principe de rendement et implique la négation de ce principe » (p. 190) : elle ne peut donc être que révolutionnaire, fondée sur un dépassement du capitalisme.