Thomas Gosset, Primitive acids À VENDÔME
Les personnages de Thomas Gosset portent les cicatrices irréversibles qu’il inflige à ses négatifs, en les mutilant et les recomposant. Il en résulte une photographie picturale et chaotique empreinte d’une beauté tragique, dans laquelle des personnages contemporains côtoient des figures du quotidien, comme radiographiées.
Le travail sur le medium, se fait couche par couche, en ajout des transparences crées précédemment par grattage, puis par ajout de peinture, travail dont l’approche relève aussi de l’eau forte, de la préparation du support par occultations et ré-inscriptions d’éléments, dessinés, écorchés, afin de conférer au tirage définitif cet esprit de la gravure. Le résultat est des plus sur-prenants, toute une attitude par rapport aux prises de vues initiales fait l’objet d’une interprétation où la main et l’oeil prennent le pas sur la photographie, pour se rapprocher de l’énergie de Bacon, fureur et mystères.
Artiste autodidacte de 36 ans né à Bordeaux. Initialement inspiré par Les Récréations photographiques de la fin du XIXe siècle et les Avant-gardes du XXe siècle, il les ré-interprète un siècle plus tard pour offrir une photographie contemporaine surréaliste et subversive.
Insubordonné à son propre médium, il concentre ses recherches expérimentales sur le sens profond de l’image et sur sa genèse en chambre noire. Ainsi, c’est au coeur même de la matière photosensible qu’il puise une esthétique singulière en détournant le processus argentique de ses applications classiques. Ce qui lui autorise une liberté supplémentaire d’expressions et une plus grands liberté d’interprétation.
De fait ses photographies se fondent dans une polysémie expressive où interfèrent les différentes couches supplémentaires, comme une écriture dispersée par une tension intérieure, afin qu’apparaissent ou disparaissent certains éléments à l’intérieur de l’image qui s’en trouve finalement enrichie.
Thomas Gosset est devenu intimement convaincu de l’éligible attention qu’il mobilise chez son regardant, quand il développe chez celui-ci l’âme d’un en-quêteur, intrications des intrigues qui s’y nouent, l’aveu d’un mystère opératif, celui du sens et de ce qui est caché, enfoui… Thomas Gosset est il un en-quêteur, un passeur de mondes, un gitan fou et inspiré en proie à sa beauté païenne, un inspiré, un bateleur du tarot de Marseille, mains de sel et doigt de feu, son propre biographe , un artiste au carrefour de différentes techniques, tout cela en même temps sans doute, augmenté d’un chapeau invisible…
Et c’est à cette attitude de recherches, de chercher une réponse à la genèse pratique de telle photographie ou telle autre, que se rencontre le roman de celles-ci et de l’aveu même de celui-ci, du retour d’un hasard intuitivement reconnu comme une force souterraine aux pratiques scripturales , coupures, gravures, peintures, qui ensemencent cette polysémie heureuse, faite de rêves et d’hallucinations, quand il faut redonner au monde sa « véritable’ image, et qu’il faut bien aller la chercher où elle est, c’est à dire sous les apparences, dans la nervure du temps, dans l’impossible photographie, au centre de sa terre, couche par couche. C’est là le lieu même de l’inconscience qui mixte son processus de clarification final, en aveugle et c’est là que le retour du sens opère une transparence des couches, surtout après qu’elles aient été révélées à elles mêmes dans leurs transparences, empilements, ou occultées par parties…pour former finalement un tout. C’est ce qui fait précisément photographie chez Thomas Gosset et ce qui nous traverse donc, dans une euphorie aléatoire et lente.
C’est dans un conte d’une beauté informelle, sombre et surréaliste que Thomas Gosset Valère pousse le réel et le processus photographique dans ses derniers retranchements. En extrayant des sels d’argent sa puissance hallucinatoire, il mêle l’évocation d’une réalité économique et sociale à une représentation plus onirique du monde. Ces émulsions photographiques «psychédéliques » sont le résultat d’un oeil acerbe sur le monde et d’un travail expérimental et manuel minutieux, de la prise de vue à la chambre noire.
Pascal Therme le 28/06/19
Publié le 5 Juillet 2019 dans:
https://www.9lives-magazine.com/54792/2019/07/05/primitive-acids-de-thomas-gosset-expose-a-vendome/
Thomas Gosset – Primitive Acids -> 11/09/19
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