MY TAYLOR IS RICH….
HERVÉ BAUDAT EXPOSE » DANS UNE MÊME LUMIÈRE« . à L’ATELIER/GALERIE TAYLOR EN VIS A VIS d’ ANGÉLIQUE BOISSIÈRE QUI EXPOSE LIGNES ET CONTOURS
Les deux expositions en regard l’une de l’autre et dans une même lumière se répondent parfaitement dans une forme de clarté littérale et littéraire, propre à séduire, par ces beaux tirages en noir et blanc, tout visiteur habité du songe de ces présences éclairées au monde, de ce que nous y faisons.
DANS UNE MÊME LUMIÈRE PAR HERVÉ BAUDAT.
©HERVÉ BAUDAT
Hervé Baudat dans une photographie soignée et juste, parle avec une très grande sincérité d’une période où il s’occupa de sa Mère grand, en Corse, et du roman de cette attention filiale, de ce temps suspendu, de ses échappées amoureuses, lyriquement sobres, pour tenir la promesse vivante au pli de la vie. Un miroir est tendu entre ces deux expositions au sein de l’atelier/galerie Taylor, et c’est entre ces deux temps que nous voyageons et que s’entendent certains des bruits d’une vie à la Modiano.
« Pourquoi certaines choses du passé surgissent-elles avec une précision photographique ? » écrit-il dans Rue des boutiques obscures et plus avant: « Je crois qu’on entend encore dans les entrées d’immeuble l’écho des pas de ceux qui avaient l’habitude de les traverser et qui, depuis, ont disparu. Quelque chose continue de vibrer après leur passage, des ondes de plus en plus faibles, mais que l’on capte si l’on est attentif. » N‘est-ce pas très rapidement ce que les photographies d Hervé Baudat retiennent au premier chef, cet incomparable retenue des signes qui ont marqué de leurs empreintes ce temps d’une intimité et que, disputés par le rêve, ils appartiennent non plus seulement à celui qui les perçoit et les inscrit dans sa photographie, mais, par la magie de l’écriture à ceux qui s’en font les lecteurs, les témoins actifs. Une possible traversée de ce qui est alors commun se déplace d’un sujet à l’autre, dans leurs retranchements et dans leurs dons. Un imaginaire s’y fait moins sédentaire, plus large et comme augmenté des preuves de l’indicible résurgence de l’Autre, ce confident aimable, capable d’aimer ce qui est aimable en soi pour aimer ce qui est aimable en l’autre afin de s’éprendre du Jeu de l’Amour et du Hasard, jeu subtil de passages et de chemins, de subterfuges et de romans dont la discrétion est une occasion de se réjouir ensemble pour re-trouver ces souvenirs qui appartiennent résolument et désormais, au fond de l’expérience, à tous.
ANGÉLIQUE BOISSIÈRE, LE PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU…
©ANGÉLIQUE BOISSIÈRE
Angélique Boissière expose des nus de qualité, réalisés au format carré dans un noir et blanc impeccable et subtil, ourlé, affranchi par sa lumière, libre. La proposition est franche et généreuse, sensuelle. Angélique Boissière photographie ces jeunes femmes nues sur la plage, en Normandie et en Bretagne, dans le soupir cumulé du vent et du souffle marmoréen de l’océan. Il n’y a pas cette sublimation d’un désir plus sexuellement masculin ou celui d’un Éros lesbien stéréotypé. S’exprime ici le relèvement d’une poétique ligérienne du vent, du sable, de l’être et des corps libérés de leurs poids, vivant dans le regard, quand ils s’épanchent, frémissent de la fraicheur de l’eau dans une notation de la sensation et de la présence.
Une quête d’unité, de rassemblement se joue au hasard de l’évènement que vivent modèles et photographe dans une juste répartition des rôles, sans théâtralité, dans une forme de constat et de reconnaissances, quasi « naturelle ». Cette naturalité des corps libres semble s’accorder à une forme d’existentialisme moderne plutôt que celui d’un naturalisme revendiqué. En effet certaines photographies semblent affirmer par les corps le primat de cette liberté de soi vécue, le primat de l’existence plutôt que celui d’une peinture stricte de la nature. Il est question surtout d’une poétique de la liberté et des sens fondant cette existence dans certains choix de vie. On augure que ces jeunes femmes ne sont pas là par hasard, qu’elles ont été en quelque sorte choisies, élues, et qu’une sorte de communauté de corps et d’esprit se fonde ici en fondant ce travail, question de fusion et de fonderies comme s’il s’agissait de revenir en esprit à Camille Claudel, et à sa sculpture magistrale, au moins en pensée.
En passant cette intensité lumineuse, le regard s’accorde à la peau, à la pose, s’illune de toute sa présence sise en son sensible équilibre pour dire l’aveu de cette fragilité heureuse, remportée contre la clôture répressive de l’époque, et pour le bonheur simple de l’expérience photographique où toute tension se résorbe en son grain, se magnifie pour s’extraire de toute coupure en prolongeant cet éternel présent de l’enfance, quand le jeu se fait plus intensément épreuve de vérité et qu’il porte au delà de ce voir la transitivité des partages. Il est alors ce que Rimbaud en dit, de cette photographie ici débarrassée de toute tension périphérique, prise en la plasticité des beaux tirages, sombres et gais, à la lumière ardente et douce, à la fine écriture, à cet aÏon, lumineux présage de ces vers du poète des Illuminations évoquant l’abandon de tout combat à travers l’involonté de ce tendre bonheur d’une paix sans victoire.
©ANGÉLIQUE BOISSIÈRE
Angélique ne cesse de se photographier à travers ses amies, modèles, une sororité élective, tout en partage et synchronicités, accorte, rebelle, intense, aimantée. Sur les bords de mer ou en intérieur, un chemin s’est fait au pli de ces hanches, de ces cuisses, de ces seins, de ces regards complices, de cet abandon au creux des rochers, aux rouleaux à l’écume blanche, sur le sable, dans le secret de l’atelier, au studio, en intérieur. Ces séances s’annoncent comme un croisement avec le portrait de la jeune fille en feu, le film de Céline Sciamma, repris dans son épissure par l’aveu de ces dos désormais complices et au secret qu’ils portent dans le silence. Un livre en est né, Marées, publié à compte d’auteur, disponible sur le site de la photographe, un livre qui assemble ces jeunes-femmes nues, nées de la vague et du regard d’Angélique.
Où il est question de NU, il est aussi question dialectiquement de UN, de cette unité assemblée par le regard convergent vers une autre série, regard que la photographe porte sur elle même.
A VENIR DANS LE PRÉSENT….un autre livre: Reflets à soi.
Ainsi se dessine le chemin de l’œuvre naissante, la trajectoire des auto-portraits qui suivront et qui me semblent approcher la question de l’identité profonde d’ Angélique, à travers un jeu de mise en scènes et d’interrogations. Quand le sujet porte sur son propre corps, visage, apparence, un regard lent et scrutateur intervient dans l’ intime conviction des mises en scène où elle est, sous l’aspect de la multiplicité des personnages qu’elle incarne, cette auto fiction séduisante, propre à évoquer les différents moments d’une identité complexe. Les miroirs jouent entre eux des reflets qui renvoient à d’autres reflets pour qu’apparaisse sans doute le travail secret de ce sujet inavoué qui en fonde toute la raison, toute l’expérience….Il faudrait ici entrer un peu plus avant au cœur de ce travail…à, suivre de près.
REFLETS A SOI ©ANGÉLIQUE BOISSIÈRE
Jours de fermeture : Lundi, Dimanche












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