BLUE MOVIE un livre de NICOLAS COMMENT
Comme à son habitude et dans son style de dandy rock romantique moderne, Gentle Man, Nicolas Comment, publie Blue Movie chez André Frères Éditions, un exercice où s’envolent ses photographies, notes de musique, notes de blues d’un Saint Tropez déserté, par les matins et par les soirs de ces presque trois mois de confinements, suite au décès du chanteur et ami Christophe…
Il semble bien que ce chagrin double emporte l’âme et la sensibilité de l’auteur mu par les prises d’images, les mises en situation, le simple moment de l’image, par l’obligeant succès de reprendre au destin ces fleurs d’une négritude musicale défunte… C’est par une composition qui s’invente avec le vent, l’eau de la mer et ces larmes, (les larmes d’Éros chères à Bataille) que Nicolas Comment réalise ce livre bleu, avec sa note bleue, Blue Note, ballade monkienne, dylanienne, plus proche du musicien, s’accordant à toute une musique américaine dans un tempo, un demi-ton au dessous, cette tonalité du blues, bleu tonal, bleu mental selon ce qu’en dit Colette et à sa suite Nicolas.
L’eau bleue, la mer, est devenue matricielle, eau nocturne et savante, eau plurielle et volontaire, eau défunte et nuptiale….eaux profondes et claires, eaux lunaires, songes d’une nuit d’été…
Tout est ici commutations, épanchements, photographies, plans godardiens du petit soldat, héroïnes lynchéennes, doubles nudités nues, alertes, séditieuses, provocantes, allumant des feux, contre culture programmatique, Beat Generation, retour des refoulés, sixties, Vadim, et Dieu créa la femme, Bardot, plus belle femme du monde, …explosions de sensualité, de sexualité, de jouissances, 68….topologie du mythe libertaire, libertés enfin libres….écritures multiples.
Blue Movie engouffre l’histoire des lieux dans une topographie singulière, secrète, mystérieuse, singulièrement en correspondances avec le fauvisme, les Fauves, dans un retour en avant de la nudité vécue sans tabou dans l’intimité des peintres, Henri Edmond Cross, Bonnard, Matisse, librement, alors que ce Blue Movie ne cesse d’en affirmer haut et fort, la valeur rédemptrice et vitale… Nu, dans le miroir de la photographie devient Un, poétique agissante de l’unité et de son souffle, ici dans le bleu augural et mental…
Selon la déambulation incertaine des jours et des nuits, le temps de la disparition de toute vie sociale, de tout temps productif, la société s’est arrêtée, le confinement est une mort mentale, carcérale. Ce temps, confisqué par l’ombre de la pandémie, disparu, est retrouvé Par Nicolas Comment dans une dé-linéation paradoxale des correspondances qui se sont établies visiblement quasi organiquement entre le refus de la claustration, de l’enfermement et l’ouverture d’un autre temps créatif, libre. Ce livre recueille ces révolutions invisibles, illicites, afin que se crée le roman visuel et le film indiscret de ces jours défunts.
Une aventure , au sens durassien de ce qui advient alors se met en place dans la réalité; nous sommes alignés, le « monde » répond à nos attentes dans une correspondance avec le vivant de l’Amour , autrement nommé Éros, se crée le lien supérieur de cette écriture ouverte à l’évènement de nos correspondances ignées avec la nature d’une psyché inventant au devant de soi le précis de sa photographie, quand le dé-clic de l’obturateur devient un métronome et que le temps de cette photographie est une sorte de prise de guerre, d’arrachement, d’autonomie à la mort et à la pandémie……
Un rêve de cinéma ne cesse alors de présenter au photographe ses personnages, ses situations, ses nudités et son Éros, inflammation des sens, bleu mental, corps s’affichant dans leur nudité princière en plein espace public déserté, à la station d’essence, quelle chance serait-on tenter d’écrire d’avoir à disposition et gratuitement un décor naturel à portée de mains, un lien au surréalisme, à l’étrange, proche du cinéma de Louis Bunuel survient de ces nus en pleine ville, Belles de jours pour ces compagnes librement nues dans la cité, au bord des plages, sur le chemin d’Eden……
Ce rêve de cinéma ne cesse de présenter conjointement au photographe toute l’ intimité de l’histoire de la peinture, le « rêve de l’âge d’or arcadien des peintres fauves » écrit-il dans sa préface ne cesse de provoquer l’intimité psychologique et le rêve de Nicolas Comment, parce que cette nuit bleue, est une immense mer liquide, aimante et matricielle, pulmonaire, aérienne, légère, qui assemble, au delà du temps comme en son manteau bleu, le chant profond qui, habitant cette terre, accueille le rêve du poète, musicien, âme chagalienne, dans le séjour aux rêves du souffle enchanté, vaste barque où rien ne se perd, où tout se créé, alors qu’au dehors, dans le temps historique, la bête est en train de dévorer un monde dis-harmonieux et séparé, soumis à l’hubris…. mais, ici, en ce temps préservé, et comme au centre de la nuit, la Bête n est qu’apparence déchue, monstre de papier, fantasme giratoire, qui n’a d’effets que lointainement, la bas, tout là bas, chez les les hommes sans souffle, promis au néant.
Ici est le corps, la beauté souveraine, l’amour fou, la peinture, tout est luxe, calme et volutpté, sous la pré-éminence de Baudelaire et de Matisse, des Fauves, de cette nuit bleue, au centre du monde, par ce ciel dédié à Vénus, centre polaire du Souffle créateur dans son logos; cette même nuit particulière, sans âge, immémoriale, d’ il y a cent ans…et qui, n’ayant cessé d’émettre sa pulsation, son cœur battant, est encore joies, laetitia et gaudia.. .joies sensuelles, joies mystiques, issues des mystères…Bleu, couleur des yeux d’Hermès, dieu des chemins creux et des bandits, des pasteurs de brebis, bleu des yeux de Dionysos, dieu de la licence, du vin et des amours.. tout est dit.
On pense à Bonnard, à cette discrète et sensuelle présence de ses nus, glanés au fil des jours, dans l’intimité de la maison, scènes de bain toujours actives au sein de l’époque, comme ces soleils révolus dans leur lumière jaune, à Signac, au pointillisme, à la lumière transparente du Sud, venus se sur-imposés au delà de la nuit éprise aux feux de l’alcool, dans un baiser fougueux, incendiaire, à la renaissance d’une mémoire qui n’oubliant rien, fête la vie créatrice, libre d’elle même, amère parfois mais prodigieuse quand elle s’aligne au principe du blues mélancolique faisant chavirer l’âme dans le bleu océan…La naissance du Jour…
Blue Movie est moins un livre fait d’agrégats, d’esquisses, de plans mémoriels, d’images pieuses dans leur provocation, (relire Bataille à ce sujet) dans leur déréliction, qu’un chant d’images à la mémoire du chanteur disparu, dans une ode à la vie, aux mystères, et à cette transcendance de toute mémoire accordant à la couleur le principe vivant de la liberté grande, dont les enfants de ce temps dylanien ont hérité et qu’ils continuent de faire vivre…afin d’augmenter la surface du Rêve qui nous fait et qui nous porte au devant de nous mêmes.. Nicolas l’écrit en conclusion de sa préface « Blue Movie: le film de notre vie rêvée. »
Nicolas Comment dévoile ici le processus de création de Blue Movie, dans toutes ses références, dans le corps des évènements et de son aventure…
SAINT TROPEZ (2014-2023).
Cette destination mythique de la French Riviera a été découverte par Nicolas Comment en 2014, grâce à une invitation du chanteur Christophe qui lui proposa de venir le rejoindre pour écrire à bord de son voilier, qui mouillait alors dans la baie des Canoubiers.
Entre 2020 et 2022, fuyant Paris et les confinements à répétition, l’artiste et sa famille trouvent à nouveau refuge dans le Golfe de Saint-Tropez, chez une amie galeriste qui leur permet d’inventer une nouvelle histoire photographique.
Sous la lumière de la Méditerranée, les 135 photographies de ce livre apparaissent comme des Time capsules qui précipitent le regardeur dans d’autres strates temporelles, oniriques et sensuelles : reliques d’un film perdu.
Dans cette aventure douce-amère, ce film arrêté, le photographe plonge le spectateur dans les paradis perdus d’une dolce vita révolue. Une échappée visuelle – antidote aux années de plomb actuelles – où des femmes nées de la (nouvelle) vague poussent les portes de « l’Autre Saint-Tropez », cher à Colette et aux peintres Fauves
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