THOMAS JORION EXPOSE PASSAGES À LA GALERIE INSULA À PARIS.

En ce samedi 16 Novembre, à l’occasion de la signature du catalogue de l’exposition, la galerie Insula organisait une rencontre avec le Photographe. C’est à ce propos que j’ai réalisé l’interview suivante.

 

En direct de la galerie: ITV de Thomas Jorion sur l’exposition Passages

 

C’est en capitaine de corvette anglaise que le photographe aborde ces rivages, évoque ces passages dans leur résolution, comme autant de prétextes à rêver, beaux palais italiens au bord de la mer, maisons domaniales à Cuba, palais libanais et indiens, grand escalier qui relie deux étages, deux mondes; il y a un jeu de cache dans ces belles photographies qui s’exposent sur les murs de la galerie INSULA, des rêves de lumières et de solitudes romanesques, de récits de cinéma et de roman, d’enfances, d’expériences du monde quand il est encore inconnu et qu’il a cette voix qui appelle en soi le dialogue amoureux, la Méditerranée, les tropiques, les alizés et que le rêve est alors ce grand albatros qui vogue sur les mers…

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©Thomas Jorion, Galerie Insula, Paris. Iseo, Italie.

Que sont donc ces photographies, dira t-on que ce sont des fenêtres sur le monde, sur un monde qui sommeillait autrefois chez l’adolescent comme une promesse d’élection, comme une proposition d’aventures. Nul doute que le jeune Thomas n’ait suivi fiévreusement les aventures de Corto Maltese, sous le signe du Capricorne, de l’ile mystérieuse ou du tour du monde en 80 jours. Tout cet esprit vernien( de Jules Verne) Carolien (de Lewis Caroll), à la fois, projection scientifique dans la maitrise des techniques « modernes », ici la photographie dans un lien anthropique, à la fois quête des pôles, c’est en voyageant sur la surface du monde que le photographe établit une cartographie de ses paysages intérieurs nourriciers, à la recherche de l’aventurier, du héraut qu’il est désormais pour lui même, sur toute face du monde écrirait le poète. C’est donc dans cette dualité, à la fois projection scientifique, également,  quête de soi, que se forge ce tempérament doux et paisible de l’auteur, au creux de la figure tutélaire de l’amoureux, romantique, parti à la conquête de son chant intérieur, de ces terres lointaines, devenues aujourd’hui voyage intérieur, voyage immobile, enchantement de ce monde arraché à l’oubli, témoignant silencieusement de l’introspection et du rêve, dans ses robes d’aube et de crépuscule, quand, s’éteint petit à petit cette lumière, qui, au passage de la nuit, renait au matin, neuve de cette virginité sacrée du premier jour… baptèmes d’aube, épiphanies… (ἐπιφάνεια, qui se lit : epiphaneia) manifestation, apparition, origines…

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©Thomas Jorion, Galerie Insula, Paris. Stellato, Italie.

Tout cela rationalise et  affleure, sous-tend, habite cette photographie à la chambre, photographie réalisée aux heures matinales et vespérales, à la lumière d’or. Tout cela s’écrit et tient le processus descriptif dans sa précision, la chambre 4X5 inches décale le trop plein de netteté vers ces passages de l’horizon, ces passages du temps, ce rêve éveillé qui fait photographie. Ce travail appelle une sorte éblouissement intérieur, mâtiné d’ Orphisme, qui tente de résoudre cet en de-ça et cet au delà du monde en soi et pour soi par le don à cet autre soi qui est le spectateur, comme le pari du jeune enfant, adressé à lui même, à travers le temps, dans une fraternité d’aventurier, de corsaire, de romantique, d’amoureux de la Beauté paisible et pacifiante, baume à la pharmacopée héritée d’ancestrales traditions et d’esprits modernes…

Une résonance claire de son obscurité induit un chemin fascinant afin que ces dialogues restituent la paresse accomplie des vieux palais, de leurs corps toujours sublime, de leurs longévités, de leurs appartenances à la fois à cet ici et maintenant, dans cet être là toujours romantique, toujours sublime et à ce qui fut, pour se hisser à une contemplation méditative et poétique où dialoguent les deux instances verniennes et caroliennes, afin d’être au monde par ce processus vivant. C’est pourquoi la voix de Thomas Jorion, Passages, est claire comme cette photographie éprise de la beauté sensuelle et chatoyante des palais, qui, a l’heure tendre s’abandonne à l’amour caressant du photographe, comme avec une femme.

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©Thomas Jorion, Galerie Insula, Paris. Malja’a, Liban.

Hier devenu aujourd’hui rêve du promeneur solitaire, passion du silence qui cueille à force de regard la gangue de cette lumière augurale…initiatrice, productive des amours en couleur du photographe et des empreintes qui se sont mises à pépier dans le couchant, à parler à travers le temps des soirs qui furent et qui résonnent l’heure silencieuse, quand tout s’est tu, sauf le rêve dans sa prodigieuse mantique et son ballet de songes, oiseaux au vent volant de sa voile….

 

 

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Thomas Jorion en personne-age…

Depuis 2013 et la sortie de son ouvrage Silencio, Thomas Jorion ne cesse de traquer la poésie qui émane des ruines, tout en constituant une archive mémorielle parallèle. Qu’il pose sa chambre argentique grand format en Inde, à Cuba, en Italie ou au Liban, il émane de ses compositions au cordeau, un parfum de mystère….Passages, l’exposition de Thomas JORION présentée à la galerie du 24 octobre au 30 novembre 2024, est une invitation à contempler des espaces abandonnés : coursives, escaliers, passerelles, arcades… Des lieux « entre » qui jouent ici le rôle de métaphores visuelles. Ne sommes-nous pas entre deux temps, passé et présent ? L’homme s’il existe, semble être de passage lui aussi ; il a laissé quelques traces : des vêtements pendent tranquillement sur un fil, quelques bancs somnolent contre une paroi… Seule la nature semble tirer avantage de cet abandon, envahissant une architecture jadis luxuriante. »   Sylvie Hugues, août 2024.

 

Photographe français né en 1976, Thomas Jorion vit à Paris et parcourt le monde pour réaliser ses paysages singuliers et intemporels. Autodidacte, il réalise ses images en lumière naturelle à l’aide d’un appareil photographique analogique grand format 4×5″. Il capture des lieux en ruines ou délaissés et nous permet de redécouvrir et d’imaginer leur gloire passée, d’un temps révolu.

En 2013, les éditions La Martinière publient Silencio, ouvrage qui regroupe plusieurs de ses séries: Silencio, L’autre Amérique, Konbini, La quête des soviets…

De 2013 à 2016, Thomas Jorion concentre son exploration photographique sur les anciennes colonies ; une nouvelle série, « Vestiges d’empire » donnera lieu à un second livre aux éditions de La Martinière paru à l’automne 2016 et présenté à l’occasion de sa participation à Paris Photo.

Depuis Thomas Jorion a repris et développe la série de Palais Italiens qui est présenté à Paris en février 2019

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